Nous avons trop souvent tendance à nous tirer une balle dans le pied en ne retenant de notre pays ou culture que les aspects négatifs. Ainsi, quand on parle d'économie ou de droit du travail, on pense de suite à la crise, au chômage galopant, aux grèves récurrentes et à l'impasse dans laquelle se trouve toute personne souhaitant réaliser des réformes. Nous passons pour une nation de contestataires fainéants et peu motivés par notre travail, impossibles à réformer et particulièrement conservateurs.
Un article du magazine Alternatives Economiques de juillet/août 2015 présente la thèse inverse en pourfendant cinq idées reçues : [1]
- Les Français sont paresseux
- Les Français sont des assistés
- Les Français sont des cigales
- Les Français n'aiment pas l'entreprise
- Les Français sont irréformables
Ainsi, on apprend que les travailleurs Français sont parmi les plus productifs au monde, avec un PIB par emploi l'an dernier de 79 millions d'euros, contre 67.6 millions en moyenne pour la zone euro. La durée hebdomadaire du travail en France pour les employés à temps plein est légèrement inférieure à la moyenne de la zone euro mais supérieure à l'Allemagne, à l'Angleterre et aux pays scandinaves. Les ménages Français comptent parmi les plus épargnants (15.1% du revenu disponible brut), derrière l'Allemagne (16.6%), la Suède (18.4%) et la Suisse (23.5%) ; ils figurent également parmi ceux qui ont en moyenne le plus de patrimoine, loin derrière la Suisse bien évidemment, mais devant les Allemands et les Britanniques. Le hic est que ces placements se font majoritairement dans l'immobilier, d'où l'entretien d'une bulle peu rentable qui n'a aucune répercussion sur la productivité à l'échelle nationale. Côté innovation et entreprise, on apprend que les Français sont les champions européens de la création d'entreprises, loin devant l'Allemagne, l'Italie ou l'Angleterre. Et, tenez-vous bien, quand on leur demande quelle importance a le travail dans leur vie, ils répondent majoritairement "c'est très important". Enfin, le sujet des réformes ne pouvait être abordé sans parler d'école et des retraites : le pourcentage de diplômés de l'enseignement supérieur est en effet passé de 18.4% pour la génération des 60-64 ans à 44% pour les 30-34 ans, ce qui place désormais la France au-dessus de la moyenne européenne (37%). Quant au régime des retraites, il a connu pas moins de 8 réformes depuis 1987. [1]
Je ne peux évidemment pas reproduire l'intégralité de l'article ici et me contente d'en extraire les points qui m'ont le plus marquée, mais je vous invite à le lire car il remet en question certaines idées reçues qui nous amènent à nous dévaloriser aux yeux de l'étranger. Nous avons des atouts certains, un terreau d'innovateurs et de créateurs, des salariés attachés à leur emploi, et en cela nous nous révélons attractifs, sinon raisonnables, pour le reste du monde. Bien entendu, cette analyse s'appuie sur des statistiques, des sondages, et nous savons qu'il est possible de présenter les chiffres de la manière la plus valorisante pour nous ; également, d'autres facteurs sont à mettre en perspective : on peut se réjouir d'envoyer de plus en plus d'élèves à l'université, mais la question du niveau global en baisse au lycée mérite d'être posée.
Pour rester dans un domaine similaire, Courrier International a publié cette semaine un article au sujet de l'annonce par Netflix et d'autres entreprises de l'instauration d'un congé payé parental "illimité" à prendre durant la première année de l'enfant. [2] Il serait ainsi possible de rester à la maison pour s'occuper de lui jusqu'à ses 1 an en conservant son poste et son salaire. Si l'annonce de Netflix en a réjoui certains, d'autres sont restés sceptiques, argumentant que le caractère optionnel et non obligatoire de ce congé va dissuader les salariés d'en profiter, "de peur d'être celui qui prend le plus de vacances", comme cela s'est à priori produit par le passé dans la firme allemande Travis CI.
Voilà bien une différence culturelle entre les Américains (ou Allemands) et nous : je connais peu de Français qui rechigneraient à exercer leurs droits au congé parental, même optionnel, à partir du moment où cela figure dans le code du travail. "Puisque les autres le font, pourquoi m'en priverais-je ?"
Mes sources :
[1] Alternatives Economiques, n°348, pages 14 à 18.
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