Cet après-midi, comme il pleuvait à verses et que, je le reconnais, je n'avais pas grand-chose à faire à l'intérieur, j'ai décidé, une fois n'est pas coutume, de regarder un film. Mon choix s'est porté sur Le magasin des suicides, réalisé par Patrice Leconte en 2012, d'après l'excellent roman de Jean Teulé. Il s'agit d'un film d'animation qui s'inspire du roman sans toutefois coller entièrement à la trame. On y trouve un certain nombre de passages chantés, et l'ensemble est entraînant et rappelle l'atmosphère finale du roman.
Le livre quant à lui m'avait énormément plu pour son humour macabre et son dénouement à la fois triste et porteur d'espoir. Il raconte comment l'arrivée dans la famille du petit Alan, l'enfant perpétuellement joyeux, change la vie de tous ses proches qui, un à un, abandonnent la déprime et les tourments pour découvrir l'amour et le bonheur de vivre. Et lorsque cet enfant tombe du haut d'un immeuble, après avoir fait promettre à ses proches de ne pas être tristes de sa disparition car sa mission s'arrête là, on se demande s'il ne s'agissait pas tout simplement d'un ange venu du Ciel et rappelé ensuite. En tout cas, une chose m'a sauté aux yeux dès la première lecture : l'amour est indissociable du bonheur ; tous ces gens étaient malheureux car il n'y avait pas d'amour dans leur vie : le frère dépressif et névrosé, la sœur complexée et persuadée de n'être qu'une bonne à rien, en sont de bons exemples. Il leur suffit de trouver l'amour, sous forme d'une relation amoureuse ou d'une vocation qui s'épanouit, pour changer radicalement de vision de la vie.
Ceci fait écho à une conviction profonde qui m'accompagne depuis l'enfance : l'amour est au centre de la vie, il en est le fondement et le moteur. Quelles que soit ses déclinaisons : amour filial ou maternel, amour du prochain, amour d'un conjoint, amour de soi-même, amour de Dieu, à mes yeux la conclusion reste la même. Sans un peu d'amour, la vie ne vaut rien. Sans un peu d'amour, l'individu demeure une enveloppe sans âme. L'amour est un formidable moteur et une force inépuisable pour celui qu'il anime.
Cela me rappelle également une séance de sophrologie de groupe nommée, si mes souvenirs sont bons, technique tridimensionnelle. Il s'agissait, une fois plongé dans son monde intérieur, de vivre ou revivre tour à tour l'un des plus beaux souvenirs de notre passé, le meilleur moment de notre présent et une belle projection de soi-même dans le futur. Les images devaient venir spontanément et nous inspirer deux éléments : d'une part le ressenti de ce dont nous nous sentions capables au moment où se déroulait la scène, d'autre part une valeur associée à ce ressenti. Les valeurs et les capacités ainsi mises en valeur nous fourniraient en quelque sorte une carte d'identité de qui nous étions à l'instant présent, avec le passé qui nous a construit et nos rêves concernant le futur.
Comme je m'y attendais un peu, le merveilleux souvenir du passé qui est remonté est lié à toi, qui ne me liras peut-être jamais mais qui, je le sais, portes ce même souvenir dans ton cœur. Ce matin où nous nous sommes réveillés, à Paris, pour la première fois côte à côte... Nous avons tous deux ouvert les yeux et tourné la tête en direction l'un de l'autre, nous nous sommes souri dans la pénombre puis, refermant les yeux, nous nous sommes rendormis. A cet instant, j'étais emplie d'une joie indescriptible mais également d'un amour si pur et si intense qu'il me semblait capable de dépasser tout préjugé et toute entrave (et Dieu sait s'il y en a eu par la suite, des entraves !). La valeur associée à ce ressenti est l'amour de l'autre, de l'être cher.
J'ai été quelque peu surprise au moment de faire l'exercice avec l'instant présent, car ma vie actuelle ne me satisfait pas toujours et je suis très souvent en prise avec de nombreux questionnements. Je me suis trouvée dans une vue de mon appartement, paisible, seule mais non solitaire, entourée d'objets que j'ai choisis rassurants et chaleureux. J'ai ressenti les connections qui me rattachent à mes proches, à mes amis, aux voisins, aux gens dans la rue ici ou à l'autre bout du monde. Je me suis sentie les aimer et en moi s'est manifestée une grande force, l'intime conviction que quelles que soient les épreuves à venir (et jugeant de celles déjà passées, je ne peux que les imaginer difficiles), je me relèverai toujours. Cette conscience ancrée en moi prenait racine jusque dans mes tripes. La valeur associé à ce ressenti serait un mélange d'amour de l'humanité et d'amour de moi.
Si à la projection du passé et du présent, je n'ai pas pu empêcher quelques larmes de couler, elles furent bien plus nombreuses quand j'ai imaginé le futur. Assise dans l'herbe par une belle journée d'été, une nappe de pique-nique étalée devant moi et des bruits joyeux d'enfants et de cascades en fond sonore, j'ai senti mon cœur fondre quand j'ai vu un petit garçon en salopette bleue, aux cheveux blonds paille, se diriger vers moi les bras grands ouverts. Cet enfant ne correspondait à personne que j'aie connu et pour cause, dans cette scène, il était évident que c'était mon fils. J'ai alors ressenti une tendresse immense pour lui ainsi que l'idée que je serais capable, et désireuse, de tout lui donner ; de lui donner le meilleur de moi-même, de lui donner tout ce que je possède et même ce que je ne possède pas. Ce sentiment d'une profondeur stupéfiante m'a remuée les tripes à nouveau. La valeur que j'ai pu associer à cette projection est l'amour maternel.
En fin de séance, lorsque la sophrologue nous a invitées à considérer ces trois projections (passé, présent, futur) comme une continuité et une certaine définition de nous-même, j'ai eu le sentiment que tout était parfaitement logique et que le fil conducteur qui guide mon existence n'est autre que l'amour, sous toutes ses formes. Et cela est vrai : à mes yeux, l'amour est la chose la plus importante au monde ; un objectif à atteindre avant toute chose ; un inestimable trésor à conquérir et sauvegarder ; une foi à laquelle adhérer avec tout son cœur et toute son âme. Parmi les raisons de ma présence sur Terre, il y a le fait de recevoir de l'amour mais aussi et surtout d'en donner. Beaucoup de choses pourront nous atteindre, nous affaiblir, nous décourager ; mais la plupart de ces épreuves seront gérées, des problèmes se simplifieront ou bien l'on finira par accepter une situation sur laquelle on n'a plus hélas aucun contrôle. Mais au-delà des épreuves, au-delà des doutes et des émotions négatives, l'amour toujours renaîtra de ses cendres, échappant à toute règle, à toute logique. L'amour, quelle que soit sa forme, est la plus pure et la plus puissante émotion qu'il nous ait été donné de vivre.
De Jean Teulé, je conseille également: Les lois de la gravité.
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